Une découverte inattendue

*Médecin légiste à Miami*

« Oui, bien sûr, j'étais ravi de discuter de ce sujet passionnant avec vous, mais je dois vraiment vous abandonner à présent. Comprenez, ce n'est pas contre vous, non, pas du tout, mais j'ai un vol pour Miami que j'aimerais beaucoup ne pas manquer. Au plaisir de vous revoir. » annonça Matteo avec un grand sourire qui sonnait légèrement faux.

Après tout discuter avec un autre médecin légiste de serpillères et de tâches ménagères et d'autres choses sans intérêt n'avait rien d'intéressant. Matteo devait donc probablement se montrer très bon acteur puisque l'autre ne voyait absolument pas l'ennui profond qu'il affichait. Lorsque ce cher collègue qui venait apparemment de Chicago, finit par lui donner son adresse, et par lui demander la promesse de lui écrire en lui donnant son avis sur les différences qui existaient entre les zèbres et les chevaux, Matteo lui répondit avec une certaine exaspération plus ou moins visible.

« En fait, docteur, ce que vous dîtes ne m'intéresse absolument pas. Pour moi, une serpillère sert à nettoyer, et c'est inutile de se servir du luminol pour vérifier que votre femme a bien tout nettoyé. Et je ne suis pas marié et je vis seul. En outre, je trouve aussi qu'un cheval est un cheval, qu'un zèbre est une sorte de cheval en pyjama et que cette conversation n'a aucun intérêt alors la continuer par mails ou par courrier, c'est au dessus de mes forces. »

En voyant l'air outré, peut-être déçu ou vexé, de cet homme qui lui vouait une certaine admiration, le jeune médecin légiste regretta ses paroles, qui avaient peut-être légèrement dépassé le fond de sa pensée. Il tenta alors un sourire pour se rattraper.

« Je disais tout ça pour plaisanter évidemment. Ce serait un grand honneur pour moi de discuter avec un homme de votre renommée. Bien sûr, la conversation me plairait d'autant plus si nous débattions sur des sujets comme... En fait je ne sais pas de quoi j'aimerais parler avec vous, mais nous pourrions reprendre cette discussion plus tard... Comme autour d'un café par exemple ? Merci encore de votre attention, cher docteur et... eum... Voilà mon adresse. Je dois vraiment y aller. Au revoir. »

Le docteur le salua par une poignée de main chaleureuse qui montrait qu'apparemment on ne lui en voulait pas. Tant mieux. Ou tant pis, au choix. Quoi qu'il en soit, Matteo se décida enfin à quitter cette grande salle dans laquelle il venait de passer les dernières heures. C'était la première conférence dans laquelle il tenait lui même un rôle et il n'en était pas peu fier. Mais les discussions qui suivaient l'ennuyaient un minimum. C'est pourquoi ce fut avec un soulagement certain qu'il quitta le grand bâtiment pour commencer à marcher dans la rue. Ce qu'il cherchait, c'était un hôtel tranquille, dans lequel il pourrait se poser en attendant le lendemain quand il pourrait prendre son avion pour Miami. Il demanderait à Alexx - non, il la supplierait - de lui laisser faire quelque chose dans la morgue malgré les jours de congé qu'il avait dû poser.

Il sortit un papier de sa poche, sur lequel était écrit le nom de l'hôtel réservé. Puis, il soupira. New York était une belle ville, cependant il regrettait sa chère Miami qu'il connaissait comme sa poche. Ici, il n'avait ni carte, ni idée de comment se rendre dans ce foutu hôtel. Quand il croisa un homme avec une capuche sur la tête sortant d'une ruelle étroite et mal éclairée, il était tellement désespéré par le fait de ne pas trouver son chemin qu'il ne se rendit pas compte que cet inconnu semblait vraiment très louche. Il alla vers lui et l'interpela, le regard rivé sur le papier de l'hôtel.

« Excusez-moi, est-ce que vous savez où... »

La fin de phrase n'eut pas l'occasion de sortir puisque presque aussitôt, un coup de poing dans le visage lui coupa toute question. Tombant à la renverse à la suite de la force de son agresseur, Matteo fut complètement sonné quelques secondes, trop surpris par ce qui s'était passé. Quand il se releva, il eut envie de sauter sur l'inconnu mais celui-ci partait en courant et il n'eut pas le courage de lui courir après. Il se passa une main sur le nez, et grimaça quand il vit le sang dessus.

« Vive l'accueil. On m'avait dit que les new-yorkais n'étaient pas désagréables avec les étrangers... Toujours des bonnes sources moi... » se marmonna t-il à lui-même.

Il s'apprêtait à s'en aller lorsqu'une masse sombre étalée sur le sol dans la ruelle attira son attention. Il s'en approcha et ouvrit de grands yeux. C'était un corps. Il s'agenouilla devant et chercha le pouls.

Comme il n'y en avait aucun, il reçut une sorte de choc à la poitrine, comme si son cœur avait manqué un battement, ce qui lui ôta toute envie de parler avec lui-même. Quelqu'un était mort et il venait de laisser partir l'assassin.

*Lt à la Crim' du NYPD*

Il avait été appelé alors qu'il était dans sa voiture en train de conduire vers le poste de police pour conclure cette journée plus qu'ennuyante et ennuyeuse. Après une course poursuite après un drogué qui se croyait poursuivi par des aliens venus de Jupiter, il avait été obligé de l'arrêter pour prise de substances illicites, puis il avait été appelé sur les lieux d'un soi-disant crime qui en fait n'était qu'une farce. Autant dire qu'il en avait plus qu'assez à cette heure là. Tout ce à quoi il aspirait maintenant, c'était un bon steak frite bien gras qui puisse bien remplir son estomac. Ce n'était pas tant de choses, mais c'était tout ce qu'il voulait à cette minute, à cette seconde précise. Lorsqu'il reçut l'appel du standard comme quoi il devait aller vérifier sur les lieux si un cadavre avait vraiment été découvert, Flack avait laissé échappé un profond soupir de lassitude avant de braquer sans plus de cérémonie les roues de son véhicules et d'aller sur les lieux du soi-disant crime. Ils en recevaient tellement des appels du même genre, qu'il ne savait même plus faire la différence entre un vrai et un faux. Voilà donc pourquoi il se retrouvait sur tous. Roulant des yeux désespérés, il gara son véhicule non loin d'une ruelle sombre d'où l'odeur d'ordures n'étaient pas imaginaires.

Après être descendu de sa voiture, il avait demandé aux officiers qui venaient de débarquer en même temps que lui, de mettre les lieux sous scellés et de faire en sorte que personne ne passe. Si jamais c'était un véritable meurtre, c'était d'autant mieux que toute cette phase avait déjà été visité avant la conclusion. Marchant d'un pas déterminé, il prit la direction de la ruelle sombre, dont l'odeur ne l'attirait pas le moins du monde. Arrivant près d'un corps humain qui ne bougeait pas, il eut la bonne surprise de voir une autre personne sur place. Était-ce un témoin, était-ce un suspect, et de qui avait-il la permission de rester côté du cadavre et de marcher peut-être sur des indices très importants ?

« Monsieur ? » Sa main à sa ceinture, prête à dégainer sa belle arme qu'il avait nettoyée le matin même, il avança presque sereinement vers la personne qui se tenait à côté de ce qui devait, indéniablement, être un cadavre. « Vous êtes l'homme qui a appelé la police à propos d'un meurtre ? »

En s'approchant, Don eut le temps de le détailler un peu plus. Un hématome ornait le visage bronzé du jeune homme. A voir son air, le lieutenant eut la certitude que c'était un étranger qu'il avait en face de lui. Sûrement venu à New York pour le boulot ; les habitants des régions du sud des États-Unis étaient trop habitués à leur climat pour, ne serait-ce qu'avoir envie de visiter les régions du nord, plus froides, pour le plaisir. Il n'avait pas l'air d'être très dangereux, mais comme la prudence est mère de sûreté, Don garda sa main près de son arme, prêt à intervenir si jamais il se passait quelque chose.

« Vous allez bien, monsieur... ? » il laissa sa phrase en suspend, attendant que l'étranger lui donne son nom. « Vous pouvez venir vers moi, s'il vous plaît ? Éloignez vous du corps. »

Alors que le nouvel individu s'arrêtait près de lui, Flack observa un peu plus longuement le bleu qu'il avait sur le visage. Il fronça légèrement les sourcils.

« Restez là, ne bougez pas. »

Don vint ensuite près du corps et l'examina rapidement avant de conclure qu'il était bien mort. Mais rien ne valait une constatation par soi-même. Toujours en dévisageant l'étranger témoin d'un oeil critique, le lieutenant sortit son portable et appela le labo pour leur dire d'envoyer une équipe d'expert sur les lieux. Après cela, il informa son commissariat du fait qu'il y avait bien un cadavre, qu'il menait l'enquête et qu'il avait de plus d'hommes pour surveiller la scène qui n'allait certainement pas tarder à attirer des curieux. Ses appels passés, il revint à l'individu qui attendait tranquillement.

« Je vais devoir vous poser des questions, d'accord ? »

*Médecin légiste à Miami*

[HJ : Je crois qu'il n'a jamais autant parlé en un seul post...]

Quand il avait appelé le 911, Matteo était plus sur les nerfs par le fait d'avoir laissé échappé l'assassin que sous le choc d'avoir trouvé un cadavre. Le standard de la police lui ayant annoncé que des flics allaient venir sur les lieux du crime et qu'il ne fallait pas bouger, le jeune homme songea à inspecter le corps, ce qu'il ne fit finalement pas. Pour son petit séjour à New York, qu'il commençait à apprécier de moins en moins, Matteo n'avait pas envie de s'attirer les foudres des policiers, médecins légistes et de toutes personnes new yorkaises qui pourraient s'intéresser à ce cas. Ce n'était cependant pas l'envie qui manquait. C'est pourquoi il prit tout de même la peine de s'intéresser au corps sans pour autant le toucher. Autant voir ce qu'il y avait à voir.

Tout en se penchant près du cadavre, il observa la plaie : le pauvre bonhomme avait tout bonnement la gorge tranchée. Il sortit un mouchoir propre et le passa sur son nez, qui continuait à saigner. Au moment où les premiers policiers arrivèrent sur place, il ne saignait plus. Il continua cependant à observer le corps - de loin évidemment - sans qu'aucun d'entre eux ne vienne lui demander de s'éloigner. Ce n'est que quelques instants plus tard qu'un homme, visiblement méfiant sur son compte, vint vers lui pour lui demander s'il était bien celui qui avait appelé. Matteo se releva en hochant la tête.

« Eum... J'ai appelé la police et c'est visiblement un meurtre. Donc l'homme dont vous parlez, c'est sûrement moi. » fit Matteo, plus sérieux que jamais.

Le lieutenant en question lui demanda s'il allait bien. Il y avait finalement quelqu'un dans ce bas monde qui s'intéressait un peu à son cas. Les autres policiers n'avaient même pas pris la peine de lui demander quelques explications sur sa présence ici.

« Vasco. Matteo Vasco. Et oui, je vais bien. J'ai juste reçu un coup sur le nez, mais il n'est pas cassé. Et puis ça ne saigne déjà plus. Ce qui m'embête, c'est que j'ai tâché ma belle chemise blanche toute neuve. » répondit-il avant de s'éloigner du corps comme on le lui demandait. « D'accord, je vous suis. »

Il s'arrêta auprès du flic en question, qui vint faire un tour vers le cadavre, avant de revenir vers lui. Matteo hocha de nouveau la tête.

« Oui, normal. Bon, je vais vous faciliter la tâche... ou en tout cas essayer. Je sortais d'une conférence... ma première conférence d'ailleurs. Il semble que ce qui m'est arrivé dernièrement m'a fait une sorte de pub... dont je me serais volontiers passé parce que j'avoue que j'avais pas trop assuré sur ce coup mais bref. Donc, je cherchais mon hôtel et j'ai croisé un type à qui j'ai voulu demander un peu d'aide. Il m'a frappé et est parti en courant. C'est après que j'ai vu le corps. Une seule plaie à première vue. Sa gorge est tranchée. Ça semble être net donc le tueur l'a fait sans hésitation. En tout cas, c'est ce qu'une première observation me laisse dire. Cependant, il n'y a pas beaucoup de sang sur place, ce qui me laisse penser que soit cette personne était déjà morte quand elle s'est fait... comment dire... tuer ? Une nouvelle fois... Ou soit il y a une autre cause de la mort parce que l'exsanguination ne semble pas évidente. Mais je vous assure que je n'ai pas touché, retourné ou quoique ce soit votre corps pour l'examiner. Enfin, pas le votre, mais celui que vous... Bon, vous avez compris. Et pour finir, vous allez retrouver mes empreintes sur lui parce que j'ai pris son pouls et que j'ai du sang sur la main... Le mien ou le sien, j'en sais rien... »

Matteo s'arrêta de parler un instant, presque à bout de souffle.

« Vous n'auriez pas de l'eau ? »

Il se tourna pour observer le corps de là où il était. Il pourrait paraître ne pas avoir de cœur, mais il avait envie de travailler sur ce cas, ce qui allait probablement être impossible puisqu'il allait être en tête sur leur liste de suspect, du moins ça paraissait logique. Celui qui découvrait le corps et appelait la police était suspect, et celui qui découvrait le corps sans appeler la police l'était aussi. Autant dire que rester enfermé chez soi à New York semblait une bonne solution. Matteo commençait à apprécier de moins en moins cette grande ville. De plus, le temps semblait sacrément se refroidir. Il soupira, puis regarda de nouveau le lieutenant qui se tenait devant lui.

« Au fait, je suis médecin légiste. Et je sais que je n'ai peut-être pas le droit de vous aider étant donné mon rôle dans cette affaire, mais si vous avez besoin d'aide, n'hésitez pas à me demander une fois que vous m'aurez éliminé de votre liste de suspect, parce que à Miami, je suis sensé être en congé et Alexx ne me laissera probablement pas bosser... »

*Lt à la Crim' du NYPD*

Tandis que l'homme qui disait s'appeler Matteo Vasco lui résumait la manière dont il était arrivé dans cette ruelle, Don prit son petit carnet noir dans la poche de sa veste ainsi qu'un stylo et y inscrivit toutes les informations utiles à l'enquête qui débutait. Il se rendit compte après un moment, que le témoin-suspect parlait du cadavre comme s'il avait quelques connaissances dans le domaine médical. Étrécissant les yeux d'un air suspicieux, le lieutenant détailla le jeune homme qui lui réclamait à présent un verre d'eau. Il haussa un sourcil. Il pensait sincèrement qu'il se promenait tous les jours avec un verre d'eau plein à la main ? Il était flic, pas distributeur d'eau, nom de nom ! Alors qu'il continuait de le dévisager, en espérant avoir quelques détails qui lui permettrait d'en apprendre un peu plus sur lui, il remarqua que ce Vasco commençait à frissonner. Il ne faisait pourtant pas si froid à ce moment là, même si c'était le début de la nuit qui commençait. C'est comme ça qu'il se rappela qu'il était étranger. Cependant, avant qu'il n'ait pu formulé ne serait-ce qu'une question, l'individu reprit la parole. Et Don l'écouta avec le début d'une lassitude qu'il savait ne serait pas longue à prendre totalement place dans son esprit.

En tout cas, sa connaissance de la médecine s'expliquait s'il était vraiment médecin légiste. Et il avait vraiment confiance en son innocence pour être sûr d'être disculpé par la suite. Déjà fatigué, Flack eut du mal à ne pas émettre un bruit d'agacement. Certes, Vasco avait beau avoir raison, mais Don n'aimait qu'on lui mâche le travail. Déjà que son patron trouvait que son travail souffrait un peu de sa forme du moment, si un suspect prenait les directives de l'enquête, ça ne lui ferait pas de la bonne publicité auprès des autorités supérieures. Essayant de passer outre son amère rancœur qu'il promenait avec lui depuis le décès du lieutenant Angell, le lieutenant se remit les idées en place. C'est alors qu'il s'arrêta sur un détail. Le ME avait parlé de Miami, qu'il venait de là-bas. Si c'était vrai, et il n'avait aucune raison de croire le contraire, ses suspicions étaient confirmés : c'était un étranger venu du sud dans le but de faire une conférence pour son boulot.

« Monsieur Vasco, » il s'arrêta, réfléchit un instant, puis reprit. « Docteur. Je vais devoir vous demander de nous suivre au poste de police pour y faire votre déposition, une fois que nous aurons fini ici. En attendant, si vous voulez bien répondre à quelques questions... Tout d'abord, de quelle pub vous parlez ? Ensuite, où exactement travaillez-vous, et où résidez-vous pour le moment. Si vous avez un numéro de téléphone, je vais vous le demander, au cas où nous aurions besoin de vous joindre. Je vous laisse aussi ma carte, si un détail vous revient. »

Il sortit une carte de travail de son porte-feuille et la tendit au médecin légiste. Puis, contre toute attente, il prit Matteo par le bras et l'attira vers le cadavre. Étrangement, il sentait qu'il pouvait faire confiance à cet homme, et jusqu'à présent, son instinct lui avait rarement fait défaut.

« Je sais que ce n'est pas dans les habitudes de la maison, mais vous avez l'air compétent, quoiqu'un peu trop bavard. Enfin, ça doit être ça de fréquenter les morts : on ne s'entend même plus parler, hein ? » Flack eut un sourire ironique avant de se mettre à étudier le corps.

De la poche de pantalon de la victime, un porte-feuille dépassait. Saisissant une paire de gants en latex blanc d'une de ses poches, il les enfila puis prit l'objet qui l'intéressait. L'ouvrant, il regarda à l'intérieur. Pas de billet à l'intérieur, le motif pouvait donc être le vol. Continuant sa petite recherche, il tomba finalement sur ce qu'il cherchait : la carte d'identité de l'homme étendu à ses pieds.

« Gavin Olson. 36 ans. Directeur commercial de la compagnie d'électronique Alvex. Intéressant. Qu'est-ce qu'un homme de cette importance pourrait faire dans une ruelle comme celle-ci ? » pensa-t-il tout haut.

Il chercha autour de lui et du cadavre avant que son regard ne tombe sur une fine poudre blanche, étalée en un petit tas près du genou gauche de la victime qui était étendue par terre, sur le dos.

« Plus rien ne m'étonne, » fit simplement Flack en se relevant.

Il se rappela de la présence de Vasco près de lui. Il désigna d'un signe de tête, le mort dont la gorge ouverte rendait la vue peu plaisante.

« Qu'est-ce que vous pouvez me dire de plus sur cet homme sans le toucher ? Votre aide sera la bienvenue, je crois que nos ME sont un peu débordés en ce moment. Mais un petit topo de ce que vous pouvez conclure maintenant serait intéressant. Les experts ne vont plus tarder également. »

Un bruit attira alors son attention vers le fond de la ruelle. Se raidissant, il porta la main à son arme, qu'il sortit et enleva la sécurité. De son autre main, il éloigna lentement le médecin légiste et le plaça derrière lui. En un murmure rapide, il lui ordonna de se mettre à couvert derrière une poubelle débordante d'ordures et de bonnes odeurs, avant de piquer un sprint vers le fond sombre de la ruelle où même la lumière des lampadaires n'arrivait pas.

« Police, sortez de votre cachette ! »

Un gémissement terrifié lui répondit, et Flack fronça les sourcils en entendant ça. Alors que son arme restait dirigée vers l'obscurité, le lieutenant fit quelques pas, s'approchant lentement, ne voulant pas signaler sa venue plus tôt que prévue. Les bruits venaient de derrière une autre poubelle. Presque à l'endroit, Don prit une inspiration et sortit de sa cachette, son revolver devant lui. Un autre gémissement terrifié fut la réponse à son action et Flack resta immobile quand il discerna la forme d'un enfant qui essayait de se fondre dans le noir et dans le mur sale du bâtiment contre lequel il était. Soulagé que ce ne soit pas un criminel prêt à lui sauter dessus, il rangea son arme dans son étui après avoir remis la sécurité et s'agenouilla près de la petite fille.

« Hey, hey, petite, » dit-il doucement avec un sourire. « C'est fini maintenant. Je suis policier, je ne vais pas te faire de mal. »

Après plusieurs minutes, il sortit avec la petite fille qui ne devait pas avoir plus de 8 ans, dans les bras. Il vint près de Vasco et demanda qu'il appelle une ambulance et qu'il regarde si elle n'était pas blessé trop grièvement.

« Lily, » l'appela-t-il. « Voici Matteo. Il est docteur, il va s'occuper de toi. Tu es d'accord ? »

Il la laissa donc au soin du médecin légiste tandis qu'il surveillait la scène et Matteo par la même occasion. Il y avait quelque chose chez lui qui le poussait à le croire, mais ça n'était pas pour autant qu'il devait l'éliminer de la liste des suspects.

*Médecin légiste à Miami*

Matteo avait à peine terminé de parler de ce qu'il avait repéré sur le corps et aussi de sa vie, que le lieutenant qui se tenait en face de lui lui posait de nouvelles questions. Lorsqu'il lui demanda plus de renseignements sur la pub dont il parlait, le sentiment de gêne monta rapidement en lui. Il avait parlé sans trop réfléchir, et même si le temps avait arrangé les choses, il n'avait pas particulièrement envie de reparler de tout ce qui s'était passé dans sa vie en ce moment. Cependant, il écouta avec attention les questions du policier, puis dès que celui-ci eut finit, il accepta la carte qu'il rangea dans sa poche avant de commencer à répondre, oubliant sa soif qui venait souvent quand il se mettait à parler vite et de n'importe quoi.

« Oui, d'accord, je viendrais avec vous. » répondit-il tout d'abord. « Quand je parlais de pub, c'était eum... Disons que je parlais sans vraiment réfléchir. C'est ce qui est arrivé en mai dernier. Une affaire un peu particulière, qui a finie dans les journaux. Un corps, un SDF, avait été retrouvé bourré de drogues et la suite était un peu... chaotique. » Il ignorait si ce qu'il disait était très clair, mais peu importe, il s'intéressa aux autres questions du lieutenant. « Je travaille avec le labo de la police scientifique de Miami. Vous connaissez peut-être Alexx Woods ? C'est ma supérieure directe. En fait, je n'ai pas encore beaucoup d'années d'expérience derrière moi mais ce métier me plaît. » Il chercha dans une poche de sa veste, une de ses cartes de visite qu'il avait distribué lors de sa conférence et la tendit à Flack. « Voilà ma carte. Y'a mon numéro de téléphone de travail de Miami. Et je vais noter mon numéro de portable, si vous souhaitez me joindre. Et pour le moment, je ne sais pas du tout où je réside. C'est justement ce que je cherchais quand j'ai reçu un poing dans la figure. Un hôtel. J'ai son nom quelque part dans ma poche... »

Décidément, il avait tout et n'importe quoi dans ses poches. Le problème, c'était principalement que ses affaires étaient déjà dans l'hôtel en question, mais qu'il lui était impossible de le retrouver, et ce, même s'il avait déjà fait le chemin inverse. Il suivit finalement le lieutenant qui lui demandait visiblement de se rapprocher du corps. La petite plaisanterie de Flack ne passa pas inaperçue, puisqu'un sourire se dessina sur le visage de Matteo, qui ne tarda pas à répondre.

« Au moins, ils n'en ont jamais marre et ne demandent jamais à ce qu'on la ferme. Ça doit pas toujours être évident de devoir écouter des gens qui racontent n'importe quoi... »

Matteo observa le flic s'activer autour du cadavre, puis il regarda autour de lui. Il se demandait à quoi la police scientifique d'ici ressemblait. Il était un peu déçu de ne voir que des policiers, il aurait aimé voir plus d'activité, pour pouvoir comparer avec sa ville préférée et dire ensuite à tout le monde, et surtout à Enzo, à quel point Miami est une ville géniale. Quand Flack donna l'identité du cadavre, le jeune légiste ne put s'empêcher de l'écouter avec attention et de faire travailler ses méninges. Même s'il n'était pas vraiment sensé bosser sur cette affaire, il se retrouvait un peu dans le même genre de situation qu'à Miami, donc il lui était impossible de se concentrer sur son rôle, c'est à dire témoin et peut-être suspect dans une affaire de meurtre.

« Peut-être qu'il cherchait un hôtel. » lança Matteo au bout d'un instant, avant de remarquer à son tour la poudre blanche.

La suite lui plut beaucoup. Premièrement, on lui demandait un petit topo spécial médecin légiste, ce qui lui donnait l'occasion de travailler un peu, et deuxièmement, on lui annonçait que les experts n'allaient pas tarder. Il allait enfin voir à quoi ressemblait la police scientifique de New York. C'était sûrement idiot, mais il avait envie de le voir depuis un moment déjà. Alors qu'il s'apprêtait à se pencher vers le corps pour voir ce qu'il pouvait dire d'autre, le lieutenant le déplaça puis lui demanda de se cacher derrière une poubelle. Matteo obéit, s'agenouilla derrière la plus grande et la plus odorante, se boucha le nez et observa la scène. Lui n'avait rien entendu, ni rien vu, mais il ne doutait pas que l'agent de police ait repéré quelque chose. Il entendit vaguement quelqu'un courir, mais la visibilité était trop faible pour qu'il puisse distinguer quoique ce soit. Quand Flack revint, il avait dans ses bras une gamine. Matteo sortit de sa cachette, et le policier lui amena la petite. Il appela une ambulance puis hocha la tête à la demande du lieutenant de police. Le jeune homme se pencha donc vers la petite fille, dont les vêtements étaient maculés de sang.

« Bonjour, ma puce. Est ce que tu as mal quelque part ? Non, ça va ? »

Tout en disant cela, il souleva avec autant de délicatesse qu'il pouvait le bas du tee-shirt de la petite, et observa avec soulagement qu'il n'y avait aucune blessure. C'était bien ce qu'il pensait. Si elle avait perdu autant de sang que le laissait présager ses vêtements, elle serait bien plus pâle, et probablement même déjà morte. Il fit signe à Flack de s'approcher.

« Elle n'est pas blessée grièvement, et ce n'est pas son sang sur elle. On dirait qu'elle a un bras cassé. L'ambulance ne va pas tarder... La pauvre petite. »

Au moins, elle ne finirait pas sur une table d'autopsie, c'était ça de gagné. Étant donné son état, la pauvre petite avait dû voir la scène, elle était choquée. Matteo ne se sentait pas vraiment à l'aise quand il s'agissait de petites filles. Il ne devait pas être fait pour être père, songea t-il alors que la gamine tirait sur la manche de Flack.

« Papa... » murmura t-elle avant de fixer le ciel et de ne plus bouger, comme si son esprit était parti loin de son corps.

Matteo la regardait et d'un coup, il regretta sa morgue où les cadavres ne lui inspiraient pas cette pitié qu'il ressentait actuellement. C'était presque comique cette façon de calmer ses ardeurs et son besoin de parler lorsqu'une situation lui était à ce point peu agréable.

« Euh, donc... Je retourne au corps ? » demanda t-il.

*CSI de nuit à NY*

Enfin, il avait une pause ! Il avait fini sa part pour l’enquête en cours, et il s’était précipité loin de toute son équipe, dans la salle de repos, où il avait pris un café taille XXL. Cela faisait presque 24h qu’il bossait avec seulement trois heures de sommeil, et il allait devoir enchaîner la nuit qui venait. Au moins il serait bien payé pour ses heures sup, et pourrait emmener sa fille dans un parc d’attraction et lui payer un grand ours en peluche. Du moins si entre temps il ne mourrait pas de manque de sommeil, ou ne se faisait pas percuter par un camion pour manque d’attention. Il s’apprêtait à prendre sa première gorgée de café, lorsque son bipeur se mit en marche. Et merde, il n’avait même pas eu le temps de boire une gorgée.

Il le sortit de sa poche en espérant que ça soit sa collègue sexy qui lui propose de la rejoindre aux dortoirs, mais fut déçu de voir qu’il ne s’agissait que de Flack. Il l’appréciait beaucoup, mais pas assez pour prendre son pied avec lui. Pas de cette façon. Avec les mecs, c’était exclusivement une bière devant un match de foot américain. Une adresse s’inscrivait dessus, et il se douta qu’il s’agissait d’un homicide. Il soupira profondément et regarda son immense tasse – qui ressemblait à une chope – de café, et non de bière bien qu’il l’eut souhaité. Il leva les yeux au ciel, pria un instant pour que ses vœux s’exhaussent, et comme le liquide restait désespérément noir, le but d’une traite en manquant de se brûler.

Fin prêt pour se rendre sur place, il passa au vestiaire, se changea rapidement, prit son gilet d’experts, et partit vers le hall pour rejoindre sa voiture. Il fut pris au dépourvu quand sa nourrice lui tomba dessus. Elle se précipita vers lui dès qu’elle l’aperçut et il fronça les sourcils. Que faisait-elle donc sur son lieu de travail ? Quand elle lui tendit la chaise de voiture dans laquelle se trouvait sa gamine, il crut comprendre ce qui se passait et pria pour qu’il se trompe. Hélas …

- Hayden, je suis désolée mais j’ai une urgence. Ma mère vient d’être admise à l’hôpital et tu comprends, il faut vraiment que je la rejoigne.

Elle lui mit dans la main le sac contenant tout ce qu’il fallait pour s’occuper d’un enfant, ainsi qu’un gros paquet de couches, et complètement hébété, Hayden mit quelques secondes à réagir. Il profita que la réceptionniste vienne s’extasier devant sa petit Helena pour lui tendre le tout et se précipita vers la baby-sitter.

- AnnaLynn, attends ! Tu peux pas me faire ça, j’ai une enquête, un cadavre ! C’est pas l’idéal, pour un môme de 1 an. Allez, j’te paye le double ! De toute façon, les parents, ça meurt forcément à un moment, et puis – il se stoppa en voyant sa tête, visiblement il ne s’y prenait pas comme il fallait – Bon, si tu veux je t’offre un hamster.

Elle soupira, et lui tourna le dos, appuyant sur le bouton de l’ascenseur. Il lui saisit le bras, et se frottant le menton, signe d’une intense réflexion, finit par s’approcher d'elle.

- Une nuit avec moi, ça ça se refuse pas, pas vrai ?

Elle haussa les yeux au ciel.

- T’es trop con. Il faut vraiment que j’y aille, démerde toi pour cette fois !

Et merde ! La porte de l’ascenseur se referma et il se retrouva comme un con, dans le hall, sa fille avec lui. Bordel de merde à la con. Il se tourna vers la réceptionniste qui n’avait pas bougé, les bras chargés, et s’approchant d’elle, la remercia avant de prendre sa fille et le reste des affaires. Bon, même si ça ne l’enchantait pas, il devrait l’emmener avec lui … En bon père, il lui fit quelques grimaces qui la firent rire, puis son inquiétude le reprit. Il n’avait pas envie que sa fille voit des cadavres, elle était beaucoup trop jeune ! Et hors de question de sécher le boulot. Et il ne pouvait pas trouver un nourrice libre en un quart d’heure.

Quand les portes de l’ascenseur se rouvrirent, il faisait l’idiot devant sa fille et deux de ses collègues le regardèrent en haussant les sourcils. Il leur adressa un large sourire et sortit. Attachant le fauteuil de sa fille sur celui de sa voiture, il rangea les couches à coté de sa mallette d’outils scientifiques. Bon, il allait bien trouver un moyen de l’emmener sans lui faire subir l’horreur d’une scène de crime. Il embrassa sa fille sur le front, et démarra sa voiture.

20 minutes plus tard, après quelques bouchons, il arriva enfin sur place et une idée lumineuse lui vint à l’esprit. Il allait bander les yeux de sa fille. Sauf qu’il n’avait rien avec lui. Il gara sa voiture non loin de la bande de sécurité, et sortit sans prendre ses affaires. Il rejoignit Don, à la recherche d’une idée. Après l’avoir salué, il regarda autour de lui, et contempla le flic de la tête au pied. Et sa lanterne s’éclaira. S’approchant de lui, il lui lança un large sourire et commença à défaire sa ceinture. Comme l’autre protestait, il le rassura.

- T’en fais pas, j’ai pas encore viré de bord. Si c’était le cas tu seras le premier à qui je ferai des avances, t’en fais pas. En attendant, j’ai juste besoin de ta ceinture, c’est urgent.

Il le remercia d’une frappe sur l’épaule et retourna vers sa voiture. La ceinture n’était pas très dure, un cuir très fin, il n’allait pas lui faire mal. Il la fixa autour de ses yeux, et saisissant le fauteuil de voiture de sa fille, avec elle à l’intérieur, il partit vers son coffre prendre sa mallette et verrouilla la voiture. Rejoignant Don, il allait confier Helena à ce dernier, quand il remarqua un autre qu’il ne connaissait pas, et qu’il devina étranger au premier coup d’œil.

- Enchanté, Hayden Campbell. Si vous n’êtes pas assassin, vous pourriez me faire le plaisir de garder ma fille le temps que je fasse mon boulot ? Merci.

Sans trop lui laisser le choix, il lui mit la gamine dans les mains et se tourna vers Flack.

- Alors, topos de la situation ? Qui est donc cet homme qui est … - il eut un regard vers sa fille qui restait tranquille dans son fauteuil – qui a rejoint le monde des anges. Si tu pouvais éviter les mots trop crus, j’ai pas envie de la choquer…

*CSI de nuit à NY*

C'était une journée comme les autres, si ce n'est plus calme. John n'avait pas d'enquête et en remerciait le ciel car pour une fois, il n'avait pas la moindre envie d'examiner cadavre et preuves. Il était bien trop occupé avec sa nouvelle acquisition : des toilettes avec une chasse d'eau automatique. Si si, des vraies ! Comme dans les WC publics, l'odeur du pipi de monsieur tout le monde en moins. C'était ses toilettes à lui, maintenant. John avait passé au moins une heure à contempler la chasse d'eau qui se lançait toute seule, lorsqu'il se mettait debout devant ses chiottes. Il n'y avait là aucune utilité, mais il en rêvait depuis un moment maintenant. Au moment où il se levait pour la vingt-septième fois, son bipper se mit à sonner. C'est après un énorme soupir qu'il se dirigea pour voir ce qu'on lui demandait. Une adresse, géniale.

C'est donc avec un plaisir légèrement limité qu'il prit sa voiture et qu'il conduisit jusqu'à l'adresse indiquée, dans les rues de New York. Une fois là-bas, il comprit qu'il était au bon endroit en repérant les voitures de police, ainsi que celle de Hayden. Il se gara aussi mal qu'il le pouvait, sortit de son véhicule et s'approcha du petit regroupement Flack/Hayden/Inconnu avec bébé.

« Bonjour tout le monde ! Hayden, Carl veut que je bosse avec toi, on dirait. C'est cool, même si j'avais d'autres projets pour cette nuit, tant pis. Alors, qu'est ce qui se passe ? »

Son attention se porta plus sur Inconnu avec bébé que sur ce qu'on pouvait bien lui raconter à propos du mort. Il fit un sourire de canard puis vint voir la gamine, qu'il observa sous tous les angles comme s'il s'agissait d'une pièce à conviction.

« Dis Hayden, c'est pas ta gamine ? T'as peur que ses oreilles se décollent, c'est pour ça que tu lui mets une ceinture autour de la tête ? Je crois qu'elle voit plus rien, là. »

... et il était sérieux. Il fronça les sourcils en voyant l'inconnu, puis il se tourna de nouveau vers son collègue.

« Eum... C'est quand même pas lui, ta babysitter super canon ? Parce que sinon, je crois que tes goûts ne sont pas tout à fait ceux que j'imaginais. Enfin, tu fais ce que tu veux, moi je vais observer le corps... Et chercher des indices. »

Il ouvrit de grands yeux, inspira une grande bouffée de bon air frais, ou peut-être pas si frais que ça au vu des énormes containers installés dans la ruelle où se trouvait visiblement le corps sans vie d'un pauvre homme massacré par des personnages mal intentionnés comme il y en avait tant de nos jours ici, dans cette grande et belle ville qu'était New York. Sortant un béret à carreaux de sa mallette d'expert, puis une pipe, il se transforma en parfait Sherlock Holmes avant de marcher doucement vers le cadavre. Sa pipe n'était cependant pas allumée, il avait horreur de ça.

John se pencha vers la poudre blanche à côté du genou du cadavre.

« Hmm... De la poudre blanche... Peut-être est-ce du sucre, peut-être de la farine, mais peut-être... est-ce notre chère substance illicite que nous aimons consommer quand nous ne sommes pas en service... »

Il remarqua le regard des autres policiers qui semblaient le prendre pour un fou.

« ... Ce que tout bon agent de police, scientifique ou pas, ne ferait jamais de sa vie, bien évidemment. »

Après une belle photo faite grâce à son appareil super génial d'expert, il prit un échantillon de cette poudre, en s'appliquant de telle façon que malgré lui, il se mit à tirer la langue comme un enfant au moment d'une activité artistique.

« Élémentaire, mon cher John... » murmura t-il autant pour lui que pour tous ceux qui auraient envie de l'écouter.